Tabacs, boutiques, pharmacies, restaurants… Depuis 2015, le canabidiol (CBD) est sur toutes les lèvres.
Dérivé du cannabis, le CBD a naturellement questionné la législation sur les stupéfiants, mais à la faveur de produits récréatifs, de bien-être ou médicamenteux, sa vente et sa consommation sont autorisées en France pour autant que les extraits de chanvre et les produits qui les intègrent aient une teneur en tétrahydrocannabinol (THC) inférieure ou égale à 0,3 %.
En tout état de cause, le THC, quelle que soit sa quantité, est classé comme produit stupéfiant par arrêté du 13 décembre 2016.
Or et au cas particulier, l’imprécision législative contraire aux objectifs constitutionnels d’intelligibilité et de clarté de la loi, m’a conduit à intervenir régulièrement pour assister des justiciables qui se sont saisis du volant après avoir consommé du CBD.
En effet, ces derniers de bonne foi ne pensaient pas enfreindre le code de la route alors que le CBD, dès lors qu’il contient du THC, est considéré a fortiori comme un produit stupéfiant.
C’est l’analyse qu’en a retenu la chambre criminelle de la Cour de cassation, par un arrêt très remarqué du 21 juin 2023 22-85.530, estimant que le délit de conduite sous l’emprise de stupéfiant est constitué par la seule circonstance que le test sanguin ou salivaire d’un conducteur révèle la présence de THC dans le CBD, peu important que la teneur soit inférieure à 0,3 %, comme c’était le cas en l’espèce.
Cette interprétation large n’en reste pas moins conforme au principe d’interprétation littérale de la loi pénale car l’article L235-1 du code de la route prévoit que « toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur alors qu’il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire qu’elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants est punie de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende ».
Le conducteur sous emprise de stupéfiant s’expose en outre à un retrait de 6 points sur son permis de conduire, à sa suspension voire à son annulation.
Dans l’exercice de leur droit de poser des questions écrites ou orales au Gouvernement, les députés ont demandé au Ministre de l’Intérieur si l’arrêt de la Cour de cassation – dont le rôle est pourtant de préciser la loi (!) – conduirait à une évolution ou, tout du moins, à sa réécriture afin de lever son ambiguïté.
Néanmoins, le Ministre de l’Intérieur, sans douté trop préoccupé à faire « place nette », a estimé que « la situation juridique est sans ambiguïté et le Gouvernement n’envisage pas de faire évoluer l’état du droit en la matière. » (JO du Sénat du 26 mars 2024, p. 2438, Rép. minist. n°2438)
À faible teneur en THC, la défonce ne sera pas au rendez-vous, mais la conduite sous CBD pourra donc nécessiter une défense en garde à vue.
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